Décembre 1966, "La Grande Vadrouille" atteint le record de 17
270 162 entrées, et reste pendant 31 ans le plus gros succès cinématographique
dans les salles françaises. Pour la première fois de sa vie, Louis
de Funès touche un pourcentage sur les recettes et amasse une
immense fortune.
Il achète ainsi le château de Clermont pour sa femme Jeanne,
d'une valeur de 800 000 francs, ancienne demeure des Maupassant, dont elle en
est une descendante. "La Grande Vadrouille" devient le point d'orgue de De
Funès, qui dès lors, n'arrêtera plus de tourner que des succès populaires.
Il faudra attendre 1956 et son célèbre rôle de Jambier de "La
Traversée de Paris", aux côtés du couple Gabin-Bourvil, pour que les
réalisateurs voient Louis De Funès comme un rôle de premier plan.
Les débuts de la gloire
De Funès jouera en 1963 dans l'adaptation de la pièce
"Pouic-Pouic" aux côtés de Jacqueline Maillan ; puis l'année suivante, il
enchaînera coup sur coup la comédie populaire "Le Gendarme de St Tropez" de
Claude Zidi, et Jean Marais lui donnera un coup de pouce pour "Fantômas".
Marais, visant à revenir sur le devant de la scène, est l'instigateur du projet,
mais il laissera Louis de Funès mettre son nom sur l'affiche avec la même
typographie que le sien.
Par retour d'ascenseur, Gérard Oury le met à l'affiche de sa
première comédie, "Le Corniaud", aux côtés de la star Bourvil,
et improvisera des scènes juste pour lui, dont la fameuse scène de douches avec
Monsieur Muscles, ainsi que la scène du garagiste (quitte à cumuler les erreurs
de raccords pendant la poursuite).
Bourvil le laissera aussi mettre le nom De Funès sur l'affiche
en aussi gros caractères que le sien.
Trois gros succès à la suite, De Funès
atteint enfin la consécration du public après avoir déjà plus de 110 films à son
actif.
C'est donc un De Funès différent que Bourvil retrouve en 1966
pour "La Grande Vadrouille". Désormais célèbre mais cherchant à fuir les
responsabilités du vedettariat, Louis délaisse les diners mondains pour se
réfugier dans son Château de Clermont.
Il enchaîne les tournages jusqu'à trois films par an, c'est la
profusion des suites du Gendarme et de Fantômas. C'est Le Tatoué avec Gabin (qui
impressionne tellement De Funès qu'il n'ose jamais l'aborder hors tournage,
donnant l'impression que les deux acteurs ne s'apprécient pas), c'est
l'adaptation d'Oscar sur grand écran, L'Homme orchestre, les retrouvailles avec
Dhéry pour Le Petit baigneur, Hibernatus, l'excellent Jo avec Blier, La Folie
des grandeurs qui devait se faire avec Bourvil, puis Les Aventures de Rabbi
Jacob.
L'implosion
De Funès remonte sur les planches pour "La Valse des toréadors"
d'Anouilh, et tandis qu'il se prépare pour la comédie physique "Le Crocodile"
d'Oury, son cœur lâche à deux reprises. Forcé au repos, Louis prend une année
sabbatique en continuant à analyser le génie de Chaplin, son maître, pour
comprendre la mécanique du rire. Les assureurs, eux, ne veulent plus prendre de
risque. Il apparaît sporadiquement au cinéma, dans L'Aile ou la Cuisse avec
Coluche (où les médecins sont aux aguets 24h/24), "La Zizanie" avec Annie
Girardot, et Le Gendarme et les extraterrestres en 1979.
En 1980 il réalise enfin son rêve en portant "L'Avare" sur
grand écran et en jouant Harpagon. La même année, il obtient également un César
d'honneur des mains de Jerry Lewis. 1981, il joue dans "La Soupe aux Choux"
qu'il a écrit, puis "Le Gendarme et les Gendarmettes". Sa santé précaire le
force ensuite à tenir la chambre.
Le 27 janvier 1983 au matin, il sort s'occuper de ses roses
(dont une variété porte toujours son nom) et dira à son jardinier : "Je
m'ennuie dans ma chambre". Quelques heures plus tard, il décède dans la
clinique de Nantes, rejoignant Bourvil et les autres. Louis de Funès avait 68
ans et avait tourné dans plus de 150 films.
NB. Pour son premier film comme réalisateur - une
adaptation en 3D du roman "Pourquoi j'ai mangé mon père" -, Jamel
Debbouze fera revivre Louis de Funès grâce à la technique de
"motion capture", qui permet d'intégrer des images anciennes dans un nouvel
environnement grâce au numérique. Bel hommage.